Seule

Sortie le 4 janvier

de Denis Lapière et Ricard Efa – Ed. Futuropolis 

La couverture dit assez bien ce que contient le livre, c’est beau et violent : une enfant pieds nus, ébouriffée, portant un baluchon, dans un espace brûlé de soleil et en arrière-plan, un cochon se vide de ses entrailles, et la nuit de la guerre s’est abattue sur le village bombardé.

C’est l’Espagne : les escadrons de Franco attaquent la Catalogne.

Seule c’est le récit des souvenirs de Lola, dont on voit la photo, prise avant la guerre, sur la première page : une toute petite fille comme les autres, avec un nœud dans les cheveux et qui regarde l’objectif.

Lorsque l’histoire commence, elle n’a pas sept ans et voilà déjà trois ans que ses parents l’ont confiée à ses grands-parents Maria et Ventura, on doit être à la fin des années 30.

Trois ans, c’est long pour une petite fille, tout ce temps sans nouvelles de ses parents et de sa petite sœur, elle essaie le soir de reconstituer leurs visages, leur présence.

Cependant le jour, elle joue avec de petits cailloux, regarde la caravane des fourmis, observe le cochon dans son enclos, elle ouvre les yeux sur la vie, elle cavale à travers champs, mais seule, toujours seule.

Et cette solitude lui donne une force, une détermination incroyable, comme si elle avait compris qu’il lui fallait traverser sa jeune existence avec sa propre énergie.

On est à la campagne, à Isona en Catalogne, on n’est pas riche, mais ce n’est pas la misère, le grand-père que la petite fille appelle padri ne sourit jamais, on parle peu à l’enfant, la grand-mère la met au lit le soir avec tendresse, elle est le refuge, mais on sent peser le silence millénaire des femmes dans son attitude mais aussi sa force.

Et puis, tout va se précipiter, avec le bombardement du village par les nationalistes de Franco, tout le monde fuit vers les hauteurs.

On découvre que cette enfant est dotée d’un sacré caractère, elle suit son grand-père redescendu voir ce qui s’est passé au village, elle n’a peur de rien, elle fonce, elle court.

Elle est le plus souvent livrée à elle-même, et le récit tente de restituer le regard d’une petite fille qui traverse des épreuves mais aussi, qui vit, et c’est cette force vitale qui nous est donnée à voir.

C’est de tout cela que sont tissés ses souvenirs, forcément subjectifs, mais c’est l’intérêt et la beauté de ce récit.

Quelques trouées de lumière : une berceuse en catalan chantée dans l’abri de fortune, un soldat républicain qui se prend d’amitié pour la petite et lui apprend à lire.

La qualité des dessins, les couleurs, les paysages qui donnent envie de découvrir ce pays magnifique, la façon dont sont croqués les visages à la serpe de ces paysans catalans, leur force et leur détermination, tout cela contribue à faire de cette lecture un beau moment.

C’est aussi le rappel jamais inutile d’une histoire pas si lointaine, dont il reste beaucoup de témoins.

Le récit graphique adopte clairement point de vue des Républicains, et l’on sait combien les combats ont été violents en Catalogne.

On imagine quelle femme forte mais sans doute aussi blessée à l’intérieur est devenue la petite Lola que la guerre a séparée de ses parents et de sa petite sœur.

« La guerre découpe les familles » dit le grand-père à Lola, et l’histoire lui donne ô combien raison, dans cette fracture inguérissable qui a coupé l’Espagne en deux, et dont les cicatrices en dépit des années de démocratie, sont toujours prêtes à se rouvrir.

Peut-être y a-t-il toujours deux Espagnes, comme dans le poème d’Antonio Machado et l’une des deux est toujours prête à geler le cœur de l’autre.

Una de las dos Españas
ha de helarte el corazón.

Danièle Trotzky

72 p., 16 € Planches © Futuropolis

Notes pour une histoire de guerre

Sortie le 4 janvier

Texte et dessin GIPI*  Ed. Futuropolis (nouvelle édition.) Planches © Futuropolis

Les notes, elles sont rapportées par Julien, le fils à papa en rupture de ban, qui les enchaîne, l’une après l’autre devant une caméra… mais cela, c’est bien après…

D’abord, c’est un pays, pas loin du nôtre, dans un passé ou un futur proche, ravagé par la guerre. Les villages aux noms de saints : San Giuliano, San Martino, San Andrea, florissants le matin sont détruits la nuit. Trois adolescents en crise tentent d’y survivre, passant d’un village à l’autre pour y chaparder puis fourguer les produits de leur rapine.Qui sont-ils ? Un dur, P’tit Kalibre, un vrai méchant qui n’a peur de rien attendu qu’il a déjà tout vu dans la ZUS (zone d’ultras-sauvages) d’où il vient ; Christian l’orphelin, un doux suiveur qui n’en tient que pour la possession d’une maison ou d’un blouson. Et Julien, un fils de famille en fuite, dont les rêves explorent le futur. Que cherchent-ils ? À prendre une revanche ? À trouver un toit ? À se prouver qu’ils existent ? À survivre envers et contre tout ?

Cédant à la tentation d’un pouvoir illusoire, le trio s’acoquine avec un groupe de miliciens dont le chef, qui prend P’tit Kalibre en sympathie, a tôt fait de leur confier quelques petites missions lucratives. L’argent facile, les mauvaises rencontres, la violence… l’engrenage se referme jusqu’à l’ultime fuite vers un monde où tout est permis et où tout se prend : celui de la guerre.

Les dessins noir et blanc, sec, anguleux, se présentent comme une série de croquis colorés à l’aquarelle grise. Les personnages ont un physique grossièrement tracé, ingrat, alors que les paysages sont eux, précis, réalistes. Nous croyons participer à un reportage de guerre. Mais la trame de l’histoire nous entraîne irrésistiblement dans la dérive romanesque d’adolescents livrés à eux-mêmes au sein d’une société violente, de non-droit. Nous accompagnons, souffle retenu, leur descente inexorable vers l’abîme, jusqu’à cette puissante scène finale… qui rattrape le rêve de Julien.Outre son talent, « le propos d’avant » dévoile un auteur sympathique qui nous livre avec simplicité comment la gloire s’est saisie de lui à l’en rendre malade, sous le regard de ses trois héros, goguenards.

Nicole Cortesi-Grou

144 p., 23 €

Planches © Futuropolis 

  • GIPI, Gian Alphonso Pacinotti est un pisan qui s’est fait connaître en France depuis 2005 avec quatre œuvres : Extérieurs nuit (Vertiges), Le local (Gallimard), Bons baisers de la province (Vertige) et Notes pour une histoire de guerre (Acte Sud). Il est actuellement illustrateur pour le quotidien italien, La Repubblica, pour lequel il a notamment illustré l’essai d’Alessandro Baricco, Les barbares.
  • GIPI autoportrait

La petite poule qui voulait pondre des œufs en or

d’Hanna Johansen (histoire) et Käthi Bhend (illustrations) – Ed. La Joie de Lire (nov. 2017) – Traduit de l’allemand par Lilo Neis et Anna Salem-Marin. 5 ans +

« Il était une fois trois mille trois-cent-trente-trois poules qui vivaient dans un grand hangar à poules. Dans l’air flottait une odeur puante de fiantes et de graines fortifiantes, et sur le sol, c’était la bousculade, car chaque poule avait juste assez le place pour ses propres pattes, rien de plus. »

© La Joie de Lire.

Entre pondre des œufs en or – ce qui reste malgré tout hautement improbable – et permettre à trois mille trois-cent trente-trois compagnes de galère de cesser de se piquer du bec entre elles, furieuses de se faire marcher en permanence sur les pattes et de ne pouvoir en toute quiétude s’acquitter au mieux de leur mission nourricière, il n’y a pas à hésiter. 

© La Joie de Lire.

L’héroïne de cette fable, que n’auraient probablement pas désavouée Jean de La Fontaine, Ésope ou Charles Perrault, n’est peut-être pas encore en âge de déposer son premier oeuf sur l’infâme paillasse qui lui sert de nid, mais elle n’a pas pour autant les deux pattes dans le même sabot. Son picotage assidu dans un angle de leur habitat commun va être pour elle l’occasion de bouleverser sa vie et celle de ses congénères et de leur permettre de découvrir qu’au-delà de la grisaille de leur quotidien, il y a la verdeur des prés et des pâturages, la blondeur des champs de blé, la quiétude d’une mare aux canards, la saveur d’un tas de fumier mûri à l’air libre. Quant aux œufs en or, ils ont naturellement ici la force d’une métaphore…

Une fable ciselée par les très beaux dessins de Käthi Bhend qui enchantera petits et grands.

Anne Calmat

72 p., 13.90 €

La Mort de Staline

Ed. Dargaud, décembre 2017

Voici réunis en un seul volume les deux épisodes de La Mort de Staline parus en 2010 et 2012, dont les auteurs sont le scénariste Fabien Nury et le dessinateur Thierry Robin.

Les teintes sont ternes, du gris, du brun, les mines sont allongées, seule la pianiste Maria Ioudina apporte une tache de couleur dans cet orchestre qui s’apprête à jouer un concerto numéro 23 de Mozart à la Maison de la Radio du Peuple.

Nous sommes à Moscou, le 28 février 1953.

Mais voilà que le camarade Staline à l’écoute ce soir-là, a apprécié le concert et en demande une copie : catastrophe, la prestation n’a pas été enregistrée.

Cet épisode qui aurait été classé sans suite ailleurs, se transforme en tragédie nationale, et les musiciens sont sommés de rejouer illico pour le  » petit père des peuples « … Tous acceptent sauf la belle soliste, dont toute la famille croupit au goulag et avec qui il va falloir négocier serré.

Le ton est donné. On ne sait si cet épisode a réellement eu lieu, mais l’anecdote est représentative de cette terreur suintante que le régime était parvenu à répandre dans tout le pays. Cette peur diffuse, c’est le sceau même de la dictature et elle est présente de la première à la dernière page de ce récit graphique.

Mais tout n’y est pas sinistre, car le caractère délirant du régime et de son chef suprême donne lieu à des passages quasiment cocasses, comme ces codes secrets dans lesquels les téléphonistes sont empêtrés car ils changent tout le temps, ou le pauvre chef d’orchestre qui tombe victime de la trouille, ou celui qu’on amène hagard en pyjama et avec une seule pantoufle pour remplacer son collègue.

Et, lorsque Staline est victime d’une attaque cérébrale, comme il a fait éliminer tous les médecins valables de l’URSS lors du pseudo complot des blouses blanches, il ne reste quasiment plus personne pour lui prodiguer des soins, et nul ne bouge pendant plusieurs jours, car le mouvement c’est la vie, et être trop vivant dans ces temps sombres, ça vous fait remarquer…

Beria, croqué ici comme un monstre désincarné et terrifiant, fait enfin annoncer la mort de Staline, avec deux jours de retard, pendant lesquels la fine équipe du comité central du parti communiste d’Union Soviétique -sans Molotov toutefois- a mis en place sa stratégie.

Les transitions politiques en dictature étant des exercices délicats, nous nous retrouvons autour de la table avec six joyeux lurons qui se regardent en chiens de faïence, mais liment leurs griffes sous la nappe : Beria, le terrible ministre de l’intérieur, l’ordonnateur numéro un des arrestations arbitraires tortures et autres purges géantes, Malenkov qui ronge son frein et attend de prendre du galon, Khrouchtchev que les autres regardent comme un danger potentiel, le seul qui pourrait s’opposer à Beria -et l’histoire leur a donné raison- Mikoyan, Kaganovitch et Boulganine. Molotov déjà sur un siège éjectable, n’arrivera que plus tard.

Mensonges, faux-semblants, votes à main levée, acquiescements de façade, c’est le grand théâtre de la dictature.

Nous ferons aussi connaissance des deux enfants de Staline, Svetlana qu’on vient chercher dans l’institut où elle enseigne, et ce grand débauché de Vassili Diougachvili, qu’on sort de son ébriété chronique et de jeux mortels aux commandes des avions du pays pour leur annoncer la fin de leur père.

On a beau connaitre l’Histoire, on se laisse embarquer dans ce thriller politique, comédie noire comme le dit Fabien Nury le scénariste de ce moment historique.

Tout se joue au Politburo où les retournements d’alliance finiront pas avoir raison de Beria, mais l’histoire de l’URSS ne s’arrête pas là…

Certains épisodes sont inventés, mais on gardera de cette lecture la vision d’un monde, pas si lointain du notre, où la dictature est entrée dans les têtes, dans les âmes, où tout est recouvert du voile de la peur, jusqu’à l’absurde, la nausée, la mort.

On pense à Soljenitsyne qui mêle subtilement souffrances sans nom et dérision absolue dans Le Pavillon des cancéreux, mais on peut aussi convoquer Gogol et ses petits fonctionnaires étriqués ou bien Boulgakov du Maître et Marguerite et bien sûr Orwell qui avait compris entre autres choses que l’essence de la dictature passe par la subversion du langage. Le roman graphique apporte à cet épisode la force des images, le travail sur la couleur, la simplification éloquente des traits, et on sait qu’un film tiré de cet album sortira en janvier 2018, ce qui ne devrait pas nous priver du plaisir de sa lecture.

D. Trotzky

144 p., 24.95 €

Recherches graphiques

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La Ferme des Animaux

 

Coup d’œil…

d’après George Orwell   Traduction du créole au français Alice Becker-Ho – Dessin Norman Pett, texte Donald Freeman – Introduction Patrick Marcoli. Avec en bonus la version créole de l’album

Les éditions de L’Echappée ont eu la belle idée de remettre en lumière cette œuvre écrite entre 1943 et 1944 par l’auteur britannique, socialiste convaincu, George Orwell (1903-1950). Elle a été adaptée en bande dessinée en 1950 par Norman Pett et Donald Freeman, sur la demande de la CIA.

1975

Cette nouvelle édition est agrémenté dans sa partie intermédiaire, entre les versions française et créole, de commentaires et de notes qui donnent de précieuses indications sur la genèse du texte et sur son auteur.

Animal farm, 1950
Animal farm, 1950

Pour dénoncer les dangers du totalitarisme, en particulier sous le régime stalinien, Orwell compose une allégorie animale, dans laquelle ce sont les opprimés qui deviennent oppresseurs, après leur combat pour la liberté. La trame est simple : deux jeunes porcs, Napoléon et Boule de Neige prennent la tête d’un soulèvement contre celui qui exploite la force de travail des animaux de sa ferme, Mr. Jones. Ils Ie chassent et instaurent un système de gestion comparable à celui des kolkhozes soviétiques. Les deux leaders sont de tempérament opposé : Napoléon, brutal et mégalomane, renvoie à Joseph Staline – il trahit les principes égalitaristes mis en place lors de la révolte contre les hommes et finit par se comporter comme eux. Boule de Neige, courageux et idéaliste, évoque Léon Trotsky. Une autre figure du récit, Cochon l’Ancien, est très probablement celle de Karl Marx.1er_strip_c_l_echappee_2016-2321e

La fable, qui tient à la fois du pamphlet politique et du conte philosophique, a rapidement été traduite et largement diffusée dans les pays du tiers-monde (Inde, Birmanie, Thailande, etc.), devenus l’enjeu des luttes entre grandes puissances, à l’instar de celle qui opposait les Etats-Unis à l’Union soviétique.

ferme_des_animaux_page_1Les têtes pensantes de la coalition vont rapidement faire prospérer la ferme, mais Napoléon veut le pouvoir absolu et il mène une lutte sans merci contre Boule de Neige. Avec la complicité de la meute de chiens qu’il a lui-même élevés, il parvient à exclure le gêneur. 20eme_strip_c_l_echappee_2016-98a36Sous couvert de protéger les animaux d’une possible contre-offensive  de celui qui est désormais présenté comme un traître, partisan des humains, Napoléon instaure un régime totalitaire, dans lequel « Tous les animaux sont égaux, mais certains plus que d’autres ». Peu à peu « ses sujets » oublient tout ce que Boule de Neige leur avait enseigné et ne sont plus capables que d’ânonner les slogans dont Napoléon les a abreuvés.

capture« Avec La ferme des animaux, on est dans un double paradoxe, puisque le récit mis en images à des fins de propagande est lui-même une dénonciation de la propagande« , ironise Patrick Marcoli, tout en mettant l’accent sur l’intemporalité et l’universalité du propos. Il n’est que de voir comment va le monde pour s’en convaincre.42eme_strip_c_l_echappee_2016-abc45 Anna K. 

80 p., 15 €

Repiblik zanimo
Repiblik zanimo

Breakfast After Noon

d’Andi Watson (scénario et dessin) – Ed. Çà et Là,  oct. 2017

En 2016, l’auteur décrivait  la valse hésitation de jeunes adultes,  entre amour, désamour, élan et dérobade, dans un album qu’il avait intitulé Points de chute – Living Arrangements (v. Boulevard de la BD).

Breakfast After Noon propose une réflexion sur perte de l’estime de soi. Les protagonistes, Rob et Louise, deux jeunes trentenaires  du West Midland (England) vont, chacun à sa façon, gérer la perte de leur emploi, et on verra comment un couple, à deux doigts de se marier, peut se retrouver au bord de la séparation.  Loin de baisser les bras, Louise entame rapidement des recherches pour trouver un nouveau job. Rob, lui, opte pour la fuite en avant. Il se refuse à changer d’employeur, et plus encore, de métier, et va même jusqu’à cacher son licenciement à son entourage.  Nervous breakdown assuré ? 

Publié dans la collection Casterman Ecritures il y a quinze ans, puis devenu indisponible, Breakfast After Noon est le premier roman graphique d’Andi Watson. On y trouve déjà cet humour acidulé et tout en finesse qui prévaudra, par exemple, dans son dernier album en dateainsi que ses thèmes favoris: les relations amoureuses, le réalisme social, avec en toile de fond la crise économique post-thatcherisme qui a frappé de plein fouet les régions industrielles anglaises.

Avec l’entrée de Breakfast After Noon chez Çà et Là, la totalité des œuvres du scénariste-dessinateur britannique est désormais au catalogue de la maison d’édition.

Anna K.

200 p., 20 €

Le Voyage de Phœnix

Coup d’oeil…

 

de Sik Jung Jung (texte et dessin) – Ed. Soleil

Après son bouleversant Couleur de peau: miel (en quatre volumes) et le film d’animation qui a suivi, Jung est revenu en 2015 sur le devant de la scène bédéiste avec ce roman graphique – en partie autobiographique – dans lequel la puissance du scénario va de pair avec la beauté des dessins.Ici, plusieurs destins s’entrelacent pour former un tout.

Tout d’abord, celui de la narratrice, Jennifer, dont le père, un marine américain, serait mort en Corée du Sud peu avant sa naissance. Une chape de plomb s’était alors abattue sur les circonstances qui ont entouré sa disparition. N’en pouvant plus et se sentant souvent en terrain hostile, la jeune fille s’est rendue à Séoul dans l’espoir de découvrir la vérité. Elle y vit depuis six ans au moment où débute l’histoire. On y découvre le destin du petit Kim, cinq ans, que ses parents adoptifs, Aron et Helen, sont venus chercher à l’orphelinat américain de Séoul. C’est Jennifer qui leur remet l’enfant. L’arrivée de ce petit être solaire « habité par une âme très ancienne » marquera à tout jamais la vie du couple.

À cette histoire intimiste, vient se greffer celle de la guerre fratricide que se sont livrées les deux Corées au début des années 50, avec en toile de fond, le régime terrifiant du dictateur Kim Il Sung, et le sort qui était réservé à ceux qui tentaient de fuir. Le personnage de San-Ho, passé du Nord au Sud après dix-huit ans de captivité dans un camp de discipline, en est une parfaite illustration.En prélude à chacun des vingt-et-un chapitres qui composent cet album qui parle de quête des origines, de secrets de famille, de mort et de résilience, le fabuleux oiseau, posté en sentinelle, semble être une promesse de renaissance pour ceux que la vie a détruits…

Superbe !

Anna K.

320 p., 19,99 €