Depuis le 14 octobre 2021 – Copyright Ø. Torseter – La Joie de lire – 104 p., 24, 90 €
Où Tête de Mule prend à nouveau le large, mais pour une tout autre raison…
BdBD 01/2021
BdBD 10/2016
BdBD 11/2018
Dans les albums précédents, Tête de Mule, qui est désormais devenu l’un de nos familiers, a successivement été un jeune prince parti à la recherche de ses six frères, changés en pierre par un troll (Tête de Mule) ; un apprenti-coiffeur parti à la recherche du plus grand œil du monde (Mulysse prend le large) ; un factotum en butte à un usurpateur d’identité (Factomule). Il est ici conservateur au Musée d’Histoire naturelle d’une ville qui reste à déterminer. Tout irait bien si le public venait voir les expos qu’il met en place, ce qui n’est pas le cas. Il risque de se retrouver au chômage, aussi lui faut-il trouver une attraction sensationnelle qui le mette à l’abri d’un tel désagrément. Tête de Mule a une idée: exhiber un squelette inédit de dinosaure. Mais où le trouver ?
Dans le même temps, le Président – qui n’est autre que l’homme à la trompe que nous avons déjà croisé à plusieurs reprises – a décidé d’aller regarder son peuple « au fond des yeux », comme il le fait chaque année depuis le début de son mandat. Le périple débute mal: les pompes à essence sont à sec, ses bains de foule risquent de tomber à l’eau. Quelqu’un lui a dit que le pétrole provient de la décomposition d’organismes primitifs dans les couches sédimentaires de la Terre… et qu’il reste un dinosaure dans la jungle. Le Président tient la solution, il ne reste plus qu’à monter une expédition et ramener l’animal, mort ou vif.
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Ces deux-là sont faits pour se rencontrer…
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On peut les voir pagayant en canoë, l’oreille aux aguets, allant peut-être au devant d’une bande de zombies affamés…
Le jeu en vaut-il la chandelle ? Tête de Mule n’en n’est plus tout à fait certain. Quant au Président, il ne doute de rien et soigne sa postérité. « Il sera enterré sur la place, et fournira de l’essence aux générations futures. »
Øyvind Torseter se surpasse une nouvelle fois avec ce concentré de poésie douce-amère, d’humour et de loufoquerie. Jusqu’où ira-t-il ?
Anne Calmat
Øyvind Torseterest l’un des illustrateurs les plus en vue de Norvège. Il a créé de nombreux romans illustrés et albums, dont plusieurs ont été récompensés. il a également participé à des expositions, individuelles et collectives.
Rappel : Après une expo à la Concept Store Gallery de Saint-Germain-des-Prés, en décembre 2021, on peut désormais retrouver Izabela Ozieblowka à La Baule…
Depuis le mois d’avril 2016, Izabela Ozieblowska élabore ses créations dans un atelier niché au cœur d’un village médiéval des Hautes-Côtes de Beaune, dont l’architecture n’a pu que l’inspirer. Elle nous a ouvert ses portes et livré quelque-uns de ses secrets…
Izabela est maître-verrier, ou si l’on préfère, vitrailliste, bien que ce vocable nous semble passablement dissonant pour désigner un art aussi subtil. Elle a acquis ses compétences et son savoir-faire durant ses treize années d’études d’Histoire de l’Art en Pologne, à l’Université Jagellon à Cracovie, à l’Académie des Beaux-Arts de Katowice et à l’Académie des Beaux-Arts, département peinture, de Wroclaw. C’est également à Wroclaw qu’elle s’est tournée vers l’art du vitrail, avec pour guide le très distingué professeur Ryszard Wieckowski, qui disait d’elle « qu’elle était l’une des trois meilleures de Pologne. »
En 2016, elle s’installe avec son époux à Nolay, où ils créent LEUR atelier. « Nous travaillons ensemble depuis 25 ans. Je m’occupe de l’aspect artistique de chaque projet, et lui de la partie technique.«
L’exposition
« Je présenterai deux vitraux abstraits et trois figuratifs »
« Les trois vitraux ont la même taille (53×63 cm) et la même source d’inspiration : le Visage. Le même pour chaque œuvre. Je voulais montrer combien chaque visage peut sembler différent en fonction de l’environnement, de l’époque et du contexte. Il exprime en tout cas une personnalité et une conscience. Cette représentation, qui date du 19ème siècle, s’intègre parfaitement dans le présent, la beauté du personnage est universelle et intemporelle. »
Le vitrail central a une histoire particulière.
« En 2020, j’ai participé à un concours régional organisé par l’Atelier d’Art de France dans la catégorie « Patrimoine« . J’ai présenté ce vitrail, il a été sélectionné pour l’exposition au Salon du patrimoine culturel, au Carrousel du Louvre. Malheureusement, en raison de la Covid et du confinement, tout a été annulé.
« Dame Nature m’a ensuite inspiré les deux vitraux abstraits ci-contre. Ils seront également exposés à la Concept Store Gallery. Nous avons d’une part une ébauche de mur avec des efflorescences de sel, et de l’autre, la lave. Pour moi, l’abstraction est un jeu de couleurs. Je m’inspire d’un fragment de nature, je prends des photos, puis ensuite, j’imagine d’autres univers à partir de l’original, modifiant ainsi son image initiale. Je travaille ensuite selon la technique des poudres de verre. »
Comment Izabela procède-t-elle pour chaque création ?
« Créer un vitrail requiert, on l’a compris, un processus très long qui comprend plusieurs interventions et fait appel à différentes techniques. En ce qui me concerne, je prépare un dessin-projet qui doit correspondre à l’espace dans lequel il prendra place. On sait par ailleurs combien le symbolisme de la lumière traversant la matière a eu d’importance dans la pensée médiévale, à l’époque où l’art du vitrail prenait son essor. Chaque vitrail doit être conçu minutieusement, étape après étape : motif, forme, couleurs, dessin… »
Le vitrail n’est pas le seul mode d’expression d’Izabela, elle excelle également dans la gravure, la sérigraphie, la méthode « Tiffany » (procédé de montage à l’aide d’un ruban de cuivre), ou dans des techniques plus modernes comme le « fusing » (assemblage du verre par fusionnement) ou bien la poudre de verre qui, conjuguée au fusing, donne au vitrail des couleurs remarquables, mais aussi, un effet sculptural qui le rend encore plus exceptionnel. « J’adore ce procédé, les poudres produisent des effets visuels étonnants, des couleurs très lumineuses et permettent une totale liberté de création. Les vitraux réalisés selon cette technique sont uniques, contrairement à un vitrail peint traditionnel qui peut être reproduit. J’aime beaucoup faire des expériences, jouer sur la profondeur, mélanger les techniques pour obtenir le résultat final que je recherche. »
Qu’ils soient classiques, sacrés ou modernes, les vitraux qui sortent de son atelier sont réalisés « dans le respect des techniques traditionnelles qui remontent au Moyen Âge« , tient-elle à préciser.
De la diversité des sources d’inspiration d’Izabela Ozieblowska (vitraux hors expo)…
Album grand format 37×26 cm – Copyright E. Bensard, C. Molas / Dada – À partir du 14 octobre 2021 – 52 p. 19€
Détail planche
Depuis la nuit des temps, les humains ont exprimé leur vécu au travers de témoignages graphiques ou de compositions tridimensionnelles.
L’album n’est pas un simple catalogue, chaque représentation fait l’objet d’un questionnement. On note par exemple la présence de la statuette d’une femme aux formes généreuses, sculptée dans l’ivoire d’une défense de mammouth. Elle a été baptisée La Vénus de Hohle Fels (le nom de la grotte où elle fut découverte). S’agit-il d’un culte rendu à une déesse ? D’un hommage personnel à la femme aimée ?
Les toutes premières représentations (- 73 000 ans) ont été découvertes en Afrique du Sud et en Asie (- 40 000 ans).
Quelques millénaires plus tard – un soupir dans l’histoire de l’humanité – nos aïeux homo-sapiens, faisant preuve d’un indéniable sens artistique, se racontent sur les parois de leur refuge. Celles des grottes de Chauvet ou de Lascaux.
Puis nous faisons un bond en avant, à la rencontre des plus remarquables, extravagantes, monumentales, scandaleuses (etc.) réalisations nées de l’imagination et du savoir-faire de l’homme. Une vingtaine de chapitres leur sont consacrées. On y trouve, statues géantes, colosses sculptés dans la montagne, tours et palais gigantesques, peintures démesurées, et bien sûr, chefs-d’œuvre picturaux patrimoniaux et extra-patrimoniaux…
Chaque sujet traité (une vingtaine en tout) apporte son lot d’informations ou de citations sous la forme de petits encarts (où ? quand ? pourquoi ? comment ? etc.)
Saviez-vous, par exemple, que…
Palais idéal
« La fée Électricité » de Raoul Dufy mesure 62, 4 m de longueur. – Le « Salvador Mundi » attribué à Léonard de Vinci est l’œuvre la plus chère de tous les temps. Elle a été achetée 450 millions de dollars par le royaume du Quatar. Toutefois, selon certains experts, il ne s’agirait pas d’un Vinci mais de l’œuvre de l’un de ses élèves.. – Joseph Ferdinand Cheval, facteur de son état, a passé 33 ans de sa vie à édifier, pierre après pierre trouvées sur sa route, un monument achevé en 1912 qu’il a nommé le « Palais idéal ». (v. ci-contre) – Qui a dit « Celui qui n’a pas gravi La Grande Muraille de Chine* n’est pas un homme brave » ?
Un album de nature à composer votre Quizz-Art personnel pour les soirées au coin du feu.
Anne Calmat
Sortie de 14 octobre
Diplômée de l’École du Louvre et de l’Université Panthéon-Sorbonne, Éva Bensard est journaliste, spécialisée dans l’art. Elle collabore depuis plusieurs années avec la revue DADA. Elle est aussi l’auteure d’une dizaines de livres pour la jeunesse, dont deux qui ont reçu le prix Historia.
Avec ses images décalées et enjouées, Charlotte Molas a d’abord séduit la presse (Le Parisien) et les marques (Le Slip français). Depuis quelques années, elle illustre aussi les albums, comme Vaches (Gallimard) ou Sales temps pour les licornes (L’Agrume).
Il y a d’abord eu Symphonie carcérale, une bande dessinée autobiographique dans laquelle Romain Dutter, coordinateur culturel au sein du Centre Pénitentiaire de Fresnes, décrivait avec humour son combat pour permettre aux personnes incarcérées d’avoir accès à la culture et aux arts. Pendant une dizaine d’années, il va vivre des moments très intenses au contact des prisonniers qui, dès leur adhésion au projet, vont s’ouvrir à une autre forme d’évasion.
Trois ans plus tard, Romain Dutter part à la découverte de la Roumanie post-communiste, trente ans après l’exécution du couple Ceausescu. Là aussi, de belles rencontres l’attendent…
Depuis le 22 septembre 2021 – Copyright C. Muller (dessin) – J-L Bocquet (scénario) / Casterman – 400 p., 24,95 €
Alice Guy (1873-1968)
Écoute-moi bien, Alice, sache une chose : ma fille actrice ? JAMAIS ! Je préfère te voir morte » avait déclaré Emile Guy.
Mais c’était sans compter avec la détermination de la jeune Alice, ballottée dès son enfance de pensionnat religieux en pensionnat religieux, de pays en pays, mais dotée d’un caractère vif, enjoué et d’une imagination débordante.
Après avoir été embauchée à l’âge de 21 ans au Comptoir de la photographie Gaumont, spécialisé dans la vente d’appareils, celle que sa mère destinait au secrétariat va rapidement gravir les échelons et faire sa première mise en scène. Ce sera « La fée aux choux », qui traite en moins d’une minute de la naissance des bébés, puis un peu plus tard, il y aura le très audacieux « Madame a des envies » (les envies d’un femme enceinte)… Elle va aussi se faire dramaturge et imaginer des scénarios plus « fun » que « l’Arrivée d’un train en gare de la Ciotat » ou « La sortie d’usine», des frères Lumière – ne négligeons cependant pas « L’arroseur arrosé » (1895). Alice Guy va ensuite participer de façon efficiente à l’édification du monument Cinéma, devenant ainsi, avec plusieurs centaines de films-minute ou de courts-métrages à son actif, l’égale de Louis et Auguste Lumière, Georges Méliès et de bien d’autres encore.
p. 80
p. 231
C’est le fantastique parcours d’une femme « qui n’avait pas froid aux yeux » que nous suivons pas à pas sur près de 322 pages, agrémentées d’un supplément de 70 pages.
Un grand merci à Catel Muller et à Jean-Louis de l’avoir remise sous les feux de leurs pojecteurs !
Anne Calmat
» Alice est ce qu’on appelle alors « une progressiste ». Aux Etats-Unis, elle adapte l’écrivain socialiste Upton Sinclair et en 1912 elle est la première, dans l’histoire du cinéma, à réaliser un film dont le casting est entièrement composé d’Afro-Américains. »
Catel Muller (dessin), Diplômée des Arts plastiques et Arts décoratifs de Strasbourg, Catel œuvre depuis 1990 dans l’illustration –romans, presse, littérature jeunesse. Dès 2000, elle ouvre la voie à une certaine bande dessinée féminine aux préoccupations contemporaines avec le personnage de bande dessinée Lucie chez Les Humanoïdes Associés, puis chez Casterman. Par ailleurs, elle développe ses évocations de destins de femmes avec des albums consacrés à l’historienne d’art Rose Valland, la chanteuse Édith Piaf, les comédiennes Mireille Balin, Mylène Demongeot et madame de Lafayette,. À partir de 2007, elle élabore avec José-Louis Bocquet des biographiques consacrées aux clandestines de l’histoire : Kiki de Montparnasse, Olympe de Gouges et Joséphine Baker. En solo, elle a aussi publié Ainsi soit Benoîte Groult et Le roman des Goscinny chez Grasset.
Catel Muller s’est imposée comme l’une des auteures les plus importantes de la bande dessinée francophone adulte, féminine et volontiers féministe. Son œuvre est couronnée par de nombreux prix prestigieux.
Jose-Louis Bocquet (scénario) a publié ses premiers romans dans la Série Noire chez Gallimard et a signé Les suivants chez Le Masque, Buchet/Chastel et La Table Ronde. Il est également l’auteur de monographies consacrées à Henri-Georges Clouzot, Georges Lautner, André Franquin et René Goscinny. Scénariste pour l’écran, José-Louis Bocquet a collaboré avec Pierre Jolivet, Hervé di Rosa, René Pétillon, Olivier Mégaton, Doug Headline, Patrick Grandperret et Georges Lautner. Scénariste de bandes dessinées, il a débuté dans les pages de Métal Hurlant et signé une dizaine d’albums avec les dessinateurs Serge Clerc, Arno, Max, Philippe Berthet, Francis Vallès, Steve Cuzor, Stanislas et Catel.