Coup d’œil dans le rétro – Love story à l’iranienne

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Copyright J. Deuxard (scénario), Deloupy (dessin & couleur) – Ed. Delcourt, 2016 -144 p., 17,95 €
Copyright Le Monde, 27 septembre 2022. « Dans les rues d’Iran, la liberté et la rage de la jeunesse : « Je me bats, je meurs, je récupère l’Iran »

Jane Deuxard est  le pseudonyme d’un couple de journalistes qui a sillonné l’Iran à la rencontre de sa jeunesse.

On découvre leur reportage, dont on mesure, à la lueur de petites scènes introductives et transitoires, les conditions particulièrement périlleuses. Pour mener à bien leur projet, les auteurs en effet ont dû braver les sbires de Mahmoud Ahmadinejad, puis d’Assam Rohani, dépasser leur peur des bassidjis (les anges gardiens du régime), de la police et des contrôles incessants.

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Les entretiens ont eu lieu dans des parcs, des cimetières ou des hôtels désaffectés. Celles et ceux qui s’expriment ici vivent à Théhéran, Shiraz, Ispahan, Yazd… Ils se prénomment Gila, Mila, Saviosh, Vahid, Zeinab, Kimia, Omid, Nima et ont entre 20 et 30 ans. Ils sont étudiant, médecin, enseignant, infirmière, femme d’affaires, serveur ou sans emploi. Tous ont pris le risque de se confier. Leur parole les révèle à eux-mêmes, tant les occasions de s’épancher sont rares. Ils parlent pour se libérer, se connaître, faire connaissance avec leur partenaire. Ils expriment leurs désillusions face à un régime que l’arrivée d’Hassan Rohani en 2013 n’a en rien libéralisé.

Les tout-puissants ont l’œil sur tout, ce qui n’empêche ni la corruption ni les petits arrangements avec les interdits, comme par exemple enchaîner les « mariages temporaires » ou filer à Dubaï pour y rencontrer de jolies prostituées.

Au fil des pages, ceux qui ont désappris à rêver déclinent leurs pauvres stratagèmes pour tenter de vivre leur jeunesse malgré tout, s’enlacer, flirter, s’aimer. Mais le prix à payer est élevé : un couple non marié se voit contraint de  régulariser ou de payer une forte amende. Les amoureux en sont réduits à trouver des « cachettes », à s’embrasser à la sauvette et à se contenter de rapports « incomplets », puisqu’un test de virginité peut être réclamé par la belle-famille. Le feu vert pour le mariage passant par les parents, les conditions sont draconiennes : possession d’un diplôme, d’un appartement, d’une voiture. Les fiançailles peuvent ainsi se prolonger pendant plusieurs années.

Le régime n’admet aucun écart : écouter de la musique, danser, jouer d’un instrument, boire, même en privé, exposent à la prison, au passage à tabac ou, dans le meilleur des cas, au pot-de-vin. Fumer en public est interdit aux femmes, le voile ajusté est bien entendu obligatoire.

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Certains rêvent de partir, conscients malgré tout qu’ils exposent leur famille, qui sera lourdement pénalisée. D’autres trouvent la force de jouir de la transgression et du risque, qui sont autant de parades contre l’ennui profond qui mine la société iranienne.

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L’ensemble est d’autant plus saisissant que les émotions et les ressentis sont exprimés au travers de représentations fantasmagoriques particulièrement éloquentes : mère récriminatrice à neuf têtes, « mollah-ogre » s’apprêtant à ne faire qu’une bouchée du peuple iranien…

La simplicité et l’authenticité des témoignages satisfont en tous points notre désir d’en savoir plus sur la vie en République islamique d’Iran, mais laissent l’impression d’un gâchis irrémédiable. On ne peut que compatir à cette jeunesse, qui dit d’elle-même qu’elle est sacrifiée.

Nicole Cortesi-Grou, 11 janvier 2016

Communiqué : L’Atelier du Plateau fait son cirque – 13è édition


Lieu pluridisciplinaire du 19è arrondissement de Paris, ce Centre National de quartier est dédié aux Résidences, à la Création et à la Diffusion.

La treizième édition de notre festival de rencontres improvisées entre cirque et musique a sonné ! Chaque soir, huit artistes de cirque et un trio de musiciens se lancent à l’assaut d’un spectacle non recyclable au canevas imaginé dans l’après-midi. Leur seul mot d’ordre : la liberté absolue, l’écoute, la sincérité et une pointe d’humour iconoclaste. Pour cette nouvelle édition, le festival se ponctue par trois temps forts au cœur d’une scénographie imaginée par la plasticienne Camille Sauvage, transformant l’Atelier du Plateau en une maison de couleurs, avec bestioles d’intérieur et signes rupestres…

Quelque chose d’animal nous accompagnera la première semaine. On pourra y voir évoqué, incarné, tout un bestiaire d’animaux domestiques, sauvages, fantastiques et même y croiser quelques vraies bêtes.
La seconde semaine sera consacrée au mât chinois, orientant notre regard vers Le monde des cimes là où l’air dit-on se raréfie et les visions s’agrandissent. Au programme, ballets d’acrobaties, et autres courses poursuites verticales.
Enfin, nous tirerons le fil dans tous les sens. Nous clamerons
Les précaires équilibres de notre espèce, et laisserons aux fil-de-féristes le mot de la fin.


L’Atelier du Plateau – 5, rue du Plateau – 75019 Paris – M° Botzaris / Jourdain

01 42 41 28 22

cdnq@atelierduplateau.org

reservation@atelierduplateau.org

contacts

tarifs/réservations

accès

Communiqué : Festival de L’Imaginaire – du 8 au 15 octobre 2022

101 Bd Raspail, 75006 Paris Tel : 01 42 84 90 00

Le Festival de l’Imaginaire, scène ouverte aux peuples et civilisations du monde contemporain depuis 1997

Programme complet :

https://www.maisondesculturesdumonde.org/

Quarante ans ans donc déjà que ce qui n’était qu’une utopie perdure, et qu’année après année la Maison des Cultures du Monde propose à son public des témoignages du génie des peuples. Des spectacles certes mais aussi des enregistrements, des articles, des études, des ouvrages, auxquels collaborent des artistes, des universitaires, des chercheurs, des passionnés de culture.
Dix-neuf puis trente parutions de « L’internationale de l’Imaginaire », près de deux-cents éditions de vinyles et CD dans la collection INEDIT, quelques dizaines de catalogues, beaux livres et autres publications pour compléter ces approches des expressions culturelles dans la richesse de leurs diversités. Mais aussi des initiatives pour que la recherche progresse, avec la création du concept de l’ethno-scénologie, cette discipline que nous avons portée sur les fonts baptismaux en 1995 pour que le concept de patrimoine culturel immatériel, à la création duquel nous avons participé, trouve en France le soutien d’une institution culturelle pour surmonter des réticences administratives caduques.
Quarante ans d’efforts d’une équipe réduite de passionnés courageux, travailleurs, convaincus de ce qui devenait pour eux une véritable
mission. Tout cela se célèbre certes, mais dans la sobriété, la continuité, avec cependant quelques clins d’œil de rappel dans ce programme du Festival de l’Imaginaire qui boucle, lui, son quart de siècle. » Chérif Khaznadar Président de la Maison des Cultures du Monde-CFPC

Que la fête continue !

Le Colibri – Élisa Shua Dusapin – Hélène Becquelin – Ed. La Joie de Lire – Livre disque

En librairie à partir du 8 septembre 2022 – Copyright É. Shua Dusapin (scénario), H. Bequelin (dessin) / La Joie de Lire – 160 p. 22,90 € – À partir de 12 ans

Lotte et Célestin, 13 ans, se sont connus sur le toit de l’immeuble dans lequel les parents du jeune garçon viennent d’emménager. Un refuge pour elle comme pour lui qui se sentent esseulés et perdus. Quelques planches plus tard, Célestin reçoit la visite « ailée » de son grand frère, Célin, reconverti en « explorateur du ciel ». On comprend peu à peu que ce grand voyageur devant l’Eternel a pris son envol définitif quelques années auparavant, et on se dit que le colibri – un oiseau extraordinaire, presque mythique – qu’il vient de déposer entre les mains de son jeune frère pourrait être l’enveloppe charnelle de celui dont le souvenir reste omniprésent et culpabilisant pour le jeune Célestin.

Pour l’heure, cet oiseau minuscule, léger comme un souffle, rapide comme l’éclair, capable d’exploits invraisemblables est « en torpeur », c’est à dire en hibernation. Il faut donc lui laisser du temps pour refaire surface, sans brusquer les choses. Le temps de la reconstruction pour nos deux héros, celui qui permet d’alléger une charge émotionnelle qui pèse si lourd, celui aussi d’interroger leur propre rapport à l’amour, à la séparation et à l’absence.

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Magnifique de finesse et de sensibilité.

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E. Shua Dusapin
H. Becquelin

Avec Le Colibri, l’autrice Elisa Shua Dusapin signe sa première bande dessinée à l’attention de la jeunesse. La finesse de son écriture dialogue avec l’humour tendre du trait de l’illustratrice Hélène Becquelin. Pour transposer la délicate économie de mots de l’écrivaine, l’artiste valaisanne joue avec une palette de gris colorés qui cède, dans les dernières pages, à une somptueuse émergence de couleurs. Un livre dont on ne ressort pas indemne ! 

Et comme c’est souvent le cas avec les éditions La Joie de Lire, un album tout lectorat dans lequel chaque adulte trouvera matière à réflexion et à émotion.

Anne Calmat