C’est comme ça que je disparais – Mirion Malle – Ed. La ville brûle


En librairie le 17 Janvier 2020
© M. Malle/La ville brûle – 208 p., 19€

Mirion Malle, que Boulevard de la BD avait découverte en janvier 2019 avec La ligue des super féministes (v. Archives), nous revient avec ce roman graphique particulièrement attachant, tout en demi-teintes et en finesse. C’est comme ça que je disparais traite du Secret – avec un S majuscule, au regard des petits secrets dont chacun est porteur ou dépositaire – qui opresse et dont on ne se libère que sous certaines conditions.

Sur les premières planches de l’album, une jeune femme, Clara, que l’on prend tout d’abord pour une adolescente, se confie à sa psy. La nonchalance de sa posture contraste avec le propos qu’elle a tenu précédemment, et qui ne nous sera révélé qu’à la toute fin du livre. La thérapeute est mutique, ou dans le meilleur des cas consent à lâcher un Mm… Pourquoi ? Clara évoque, entre autres choses, le fantasme qui l’habite régulièrement de mettre fin à ses jours, comme par jeu, pour voir. Les termes qu’elle emploie nous semblent d’abord insolites, puis on apprend que l’action se déroule au Québec. Ne percevant aucune once d’empathie chez son interlocutrice, Clara décide qu’elle ira chercher ailleurs une oreille plus récéptive.

Fin de l’épisode, cependant que son mal de vivre lui laisse peu de répit.

Clara est attachée de presse dans une maison d’édition. Un nouveau titre est sur le point de paraître, elle est submergée de boulot, épuisée. Elle a elle-même écrit un roman, au grand désintérêt de la plupart de ses collègues, et en attaque un second : une lutte avec les mots qui sans cesse se dérobent. Clara ne manque pas d’amies, mais leur sollicitude semble lui peser, elle préfère être seule, se réfugier sous sa couette dès qu’elle le peut, son téléphone à portée de main.

Nous la retrouvons en compagnie de trois de ses amies à l’occasion de l’anniversaire de l’une de leurs copines. Arrivées à bon port, les conversations tournent autour des mecs un peu lourds, très lourds même. Clara intervient peu. Elle sait cependant se montrer attentive aux autres et même être une conseillère avisée lorsqu’il le faut…

Bien que le titre de ce roman graphique d’une actualité brûlante ait été inspiré à Miron Malle par celui d’un album du groupe de rock-punk américain, MCR, on pense plutôt au « Mal de vivre, qu’il faut bien vivre, vaille que vivre » de la chanteuse Barbara ; et on se dit une fois encore que toute situation porteuse de destruction psychologique renferme en elle tous les possibles, pour peu que l’on saisisse la main qui se tend (la gauche, celle du cœur) et que viennent les mots trop longtemps retenus.

Anne Calmat

Mirion Malle est une autrice et dessinatrice de bande dessinée française, qui vit aujourd’hui à Montréal. Elle s’est formée à l’ESA Saint-Luc (Bruxelles). Elles est également titulaire d’un master de sociologie, spécialité Études féministes.

Mirion Malle

Bien connue pour ses BD didactiques, elle a publié en 2016 Commando Culotte (Ed. Ankama), en 2017, elle illustre Les règles, quelle aventure ! d’Elise Thiébaut (Ed. La ville brûle), un livre destiné aux pré-ados et aux ados. En janvier 2019, elle publie La Ligue des super-féministes (Ed. La ville brûle).