Les Vieux fourneaux (T. 5) Bons pour l’asile

En librairie le 9 novembre 2018

de Wilfrid Lupano (scénario) et Paul Cauuet (dessin) – Ed. Dargaud Bénélux

Visuels © Lupano/Cauuet/Dargaud

Un énorme radeau gonflable vient s’échouer tel un cheval de Troie devant l’ambassade de Suisse à Paris, semant la pagaille parmi le personnel de sécurité. Une bande de vieillards déguisés en oncles Sam, gilets de sauvetage autour du cou, tente de prendre d’assaut la représentation helvétique en demandant à corps et à cri l’asile fiscal, et se retrouve inexorablement au poste…

C’est ainsi que s’ouvre le tome 5 des Vieux fourneaux. Le lecteur retrouvera ses personnages favoris : Antoine, Mimile et Pierrot, toujours gaillards, toujours prêts à renverser l’ordre établi, à s’insurger contre les injustices sociales, la mondialisation, le pouvoir des banques, le sort fait aux migrants.

Tandis que Pierrot retrouve au commissariat une ancienne ado dont il fut l’éducateur et qui est entrée dans la police, Antoine qui a la garde de sa petite-fille Juliette se voit obligé de reprendre contact avec son fils, et Mimile, qui s’apprête à assister au match de rugby France-Australie, erre dans les rues de Paris à la recherche de l’île de la Tordue, squat anar reconverti en dressing chic pour réfugiés par un artifice langagier dont on laisse la primeur au lecteur.

La question des migrants court comme un fil rouge le long de ce tome 5 et surgit aussi là où on ne l’attendait pas forcément.

Celle aussi de l’apparence dans notre société, où Cauuet et Lupano nous conduisent à des réflexions plus profondes qu’il n’y parait.

(détail planche).

On a toujours plaisir à retrouver l’équipe de vieux rebelles qui font chaud au cœur, et le tandem d’auteurs, œil ouvert sur le monde comme il va, a trouvé le filon pour nous faire sourire et nous alerter tout à la fois, par petites touches bien senties, du tas de cailloux énormes empilés sous le métro pour empêcher les réfugiés d’y trouver un abri pour la nuit, à la politique ségrégative des Australiens qui déportent les réfugiés sur une île perdue transformée en prison …

On chemine aussi avec les personnages et leur propre histoire familiale, retrouvailles, fâcheries, désaccords éthiques…. Mais mais mais, il faut bien dire que la veine commence à se tarir un peu, ou c’est peut-être le lecteur qui vieillit, on peine à retrouver la jubilation du premier tome…

Le plaisir est moins vif, mais il est toutefois toujours au rendez-vous, et le dessin nous rend presque joyeuses les marques des années qui s’inscrivent sur les visages de ces vieux irréductibles ; il faut aussi saluer toute la malice contenue dans le titre de l’album.

Danièle Trotzky

56 p., 12 €

 T. 1 à 3 : voir BdBD Archives février 2016