
D’après le roman de Virginia Reeves
Le récit a pour cadre la grande crise économique des années1930 qui a vu les petits fermiers ruinés par l’appauvrissement du sol et la mécanisation de l’agriculture, contraints à l’exil, cependant que leurs créanciers, les banques, s’emparaient de leurs terres pour les exploiter. La première planche de l’album s’ouvre sur les prémices de cet exode forcé.
On pense au roman de John Steinbeck, Les Raisins de la colère, dont s’est vraisemblablement inspirée Virginia Reeves pour l’écriture de son roman – qui se déroule en Alabama (Stock, 2016) – fidèlement adapté et mis en images par Alex W. Inker.
Le personnage central, Roscoe T. Martin, est un garçon débrouillard qui n’hésite pas à flirter avec l’illégalité en cas de nécessité absolue. Il vit dans la ferme dont a hérité sa femme, Mary, avec leur fils. Elle est passionnée de lecture et se donne corps et âme aux travaux des champs, mais le revenu est maigre, les huissiers se profilent. Lui au contraire ne veut pas entendre parler de labour, il est électricien, point à la ligne.
Comment exercer son métier en ces temps de marasme économique ? Un jour, Roscoe a une idée qui devrait leur permettre à tous de s’en sortir…


Tout semble être rentré dans l’ordre, jusqu’à cet accident mortel, celui d’un employé de la compagnie chargée de l’électrification du comté.

La suite est une longue descente aux enfers. Roscoe va se retrouver en prison, totalement abandonné par les siens, exposé au sadisme des gardiens, à la violence des rapports sociaux, et témoin de la ségrégation raciale qui y règne en maître. Mais il est de la trempe de ceux qui s’en sortent. À moins que, neuf ans plus tard, il ne puisse toujours pas échapper moralement à la culpabilité de la « faute originelle » qu’il a commise en voulant sauver la ferme de Katy…
Le dessin d’Alex W. Inker – souvent en gros plan – participe beaucoup à la réussite de l’album. Son trait puissant aux couleurs fortes donne de l’expressivité aux personnages et traduit parfaitement l’atmosphère poisseuse du récit.
Anne Calmat