
Le mail que vient de recevoir Georges Benoît-Jean, auteur de BD en panne d’inspiration, est providentiel.
Un certain Magnus Kuller lui propose de participer à une expédition scientifique et artistique sur un fjord du N.-E. du Groenland. Le sculpteur allemand Ulrich Kloster entend en effet y installer une œuvre monumentale et se faire filmer devant elle, afin de dénoncer l’exploitation de la région par les lobbies pétroliers.
Stimulé par la perspective d’un sujet d’album passionnant, autant que terrifié par le principe de réalité d’une telle aventure, Georges, l’alter ego de Tanquerelle (qui a vécu une expérience similaire), se jette à l’eau et accepte.
Le voici maintenant à bord de la goélette de Magnus Keller, « L’Aurora « . Il y a là plusieurs scientifiques, Kloster et tout son staff, ainsi qu’un écrivain passablement alcoolique nommé Jorn Freuchen. Il n’est pas sans évoquer le célèbrissime capitaine Haddock. Georges a dans le passé adapté en bande dessinée les récits de voyage de Freuchen et ce dernier en profite pour lui faire miroiter un nouvel album. Dans la foulée, il l’entraîne dans une recherche homérique de bouteilles de whisky centenaires prises dans les glaces polaires.
Georges va aussi découvrir, entre autres joyeusetés, le mal de mer, les quarts de veille, l’obligation de porter une combinaison de survie… Et surtout celle d’avoir à supporter l’iracibilité et la paranoïa aiguë du sculpteur. L’aventure a viré au surréaliste, le vertigo arctique n’est pas loin.
Sur le plan visuel, Hervé Tanquerelle s’inspire de la ligne claire hergéenne – ses dessins sont subtilement rehaussés par la coloriste Isabelle Merlet – et nous gratifie en prime de superbes paysages à l’aquarelle.

Un album gouleyant, avec, cerise sur le gâteau, le plaisir pour les tintinophiles de découvrir les multiples hommages que Tanquerelle rend à l’auteur de L’Etoile mystérieuse, à commencer par le nom de baptême du rafiot qui trimballe toute cette bande de louftingues.
Anna K.
104 p., 19 euros