Le scénario – Dans une grande ville grouillante, Charlie, un jeune homme plein de bonne volonté, travaille pour Recycle & Ternel, une société dont le slogan est « Vous mourez, nous recyclons ». Charlie passe donc son temps à répondre au téléphone à des familles qui veulent savoir en quoi pourrait être transformé leur cher défunt. Un jour, un gamin l’appelle pour lui demander ce qu’est devenue l’âme de sa maman. Incapable de répondre, Charlie va se lancer dans une enquête au cœur de la mort et de l’amour…
L’Éditeur – Kid Toussaint et Aurélie Guarino nous livrent une fable tout en sensibilité sur la mort, la vie après la mort et l’amour à travers le temps.
Où l’on fait la connaissance d’un livreur à vélo de plats préparés, considéré comme efficace par sa boîte et ses clients. Quand Simon apprend que, mine de rien, il a déjà parcouru 7 231 kilomètres, soit la distance Paris-Katmandou, rien qu’en pédalant à longueur de journées dans les rues de Paris, il a un déclic : la vie a sûrement mieux à lui offrir. En tout cas, cela vaut la peine de le vérifier. Son ami de toujours, à qui il propose une échappée – forcément belle – vers de nouveaux horizons, décline son offre de l’accompagner. « Tu tombes mal, je viens de dégoter un taf de rêve » répond-il. Florent vient en effet tout juste d’être embauché chez Bullshift Business, une entreprise façon Silicon Valley. Mais le jeune homme en perçoit d’emblée le côté « Youpla boum tagada tsouin tsoiun ! » à tout crin et il prétexte une obligation familiale impérative pour se donner le temps de réfléchir avant de signer son contrat. Oh, juste une petite semaine !
Ainsi démarre La Ride…
Les deux amis optent pour la Bourgogne natale de Flo. Ils vont croiser des cyclistes « pro », qui les prennent pour des bleus, des chasseurs éméchés, mais aussi des bonnes âmes qui leur prêteront main-forte en cas de panique. ils vont suer sang et eau sur les chemins escarpés qui conduisent aux massifs du Morvan, redécouvrir un bon nombre d’images oubliées, comme par exemple celle de ces hameaux en panne d’habitants…
Un album d’une belle simplicité, un hymne à la liberté, comme une évidence, qui se lit le sourire aux lèvres et avec des étoiles plein les yeux.
Ce qu’en dit l’éditeur. « Attention, cet album est dangereux ! Vous risquez fort, une fois sa lecture achevée, de tout plaquer pour partir sur les routes à votre tour, en quête de grand air et de retour aux sources. Car La Ride propose de faire un pas de côté pour réfléchir et s’interroger sur les limites de notre vie quotidienne, son stress et sa vacuité. Vivre le nez dans le guidon, au sens figuré, ça finit par lasser. Vivre avec les mains sur le guidon et la tête dans les nuages, c’est tout de même autre chose !«
En biologiste épris de littérature et de poésie, Jérôme Sueur nous emmène écouter les mille et un sons de la nature. Paysages enneigés, volcans, tempêtes marines, jungles tropicales, grenouilles et cigales, chants d’amour et de défis, laboratoires et chambres anéchoïques, l’auteur nous guide partout à travers le monde, au gré de ses expériences de terrain, pour nous révéler les secrets des sons de la nature, la relativité du silence et ses significations, la mécanique et la physiologie de l’audition, la pollution sonore anthropique. Avec un sens accompli du récit, Jérôme Sueur nous invite à méditer sur notre place dans le monde, sur la pollution sonore que nous produisons désormais à chaque instant, sur notre capacité d’écoute, notre aptitude à être à l’écoute des autres et du monde.
Depuis le 5 avril 2023 – 22 €
Histoire de ma vie Marcel Marceau (1923-2007), né Mangel, a profondément marqué l’art du mime. Sa marche contre le vent ira jusqu’à inspirer le moonwalk de Michael Jackson et sa conception du corps influencera, entre autres, les chorégraphies de David Bowie. Mais qui connaît vraiment l’homme derrière le mime ? Histoire de ma vie contribue à comprendre sa vision de l’art du mime et l’ancrage artistique acquis dès son enfance. Toutes ses pantomimes seront des cris silencieux contre l’absurdité de la guerre et des hommes et lui permettront de rester debout et de continuer à croire en un monde meilleur. Le mime Marcel Marceau a parcouru les scènes du monde entier avec son célèbre personnage Bip, alter ego silencieux. Au seuil de la mort, il confie à ses enfants son manuscrit “Histoire de ma vie”, un récit de jeunesse où il évoque sa naissance à Strasbourg en 1923, son enfance de “petite âme verte”, la montée de l’antisémitisme en France, la résistance avec son frère pendant la Seconde Guerre mondiale, la Maison de Sèvres auprès des enfants cachés ou encore sa formation d’acteur chez Charles Dullin et Étienne Decroux à Paris. Il y déploie sa vision de l’art du silence et nous entraîne au coeur de sa pensée d’artiste et de poète pour mieux saisir l’essence de ses créations, cris contre l’absurdité de la guerre et des hommes. Pour étoffer ce récit : plus de cent-cinquante documents, de nombreux extraits de ses écrits, une chronologie biographique exhaustive ainsi qu’une bibliographie, une filmographie et la liste de ses spectacles et pantomimes. Le témoignage puissant et vivant d’un artiste majeur qui réinventa l’art du mime et se hissa au rang de mythe dans la grande histoire du théâtre.
Visuels Copyright P. Alary (scénario et dessin) / Ed. Rue de Sèvres – 150 p., 25 € – Depuis le 5 avril 2023
Les cinéphiles éclairés se souviennent du personnage de Scarlett O’Hara (Vivien Leigh) dans la superproduction aux 10 Oscars mise en scène en 1939 par Victor Fleming, Autant en emporte le vent – Gone with the Wind. Ils n’ont pas oublié non plus le très ambigu Rhett Butler (Clark Gable) et la nounou noire au caractère bien trempé, que Scarlett appelait Mammy (Hattie McDaniel) (ci-dessous).
Dans le roman de Margaret Mitchell, Scarlett O’Hara est une jeune et riche héritière sudiste de 16 ans, aux yeux de qui rien ni personne ne doit résister.
Lorsque la Guerre de Sécession éclate en 1861, ses repères s’écroulent et de lourdes responsabilités s’imposent à elle. L’arrivée de Rhett Butler, un homme sans foi ni loi, aussi immoral que séduisant, rebattra de nouveau les cartes dont la jeune fille dispose pour atteindre le bonheur. Mais elle va passer à côté, en aimant à contre-temps, d’abord son cousin, Ashley Wilkes, pourtant promis à sa sœur, puis Rhett.
Celles et ceux qui ont côtoyé l’œuvre n’auront sans doute pas oublié non plus l’état de déréliction qui est celui de Scarlett lorsqu’elle se jure de reconquérir son époux, qui vient de claquer la porte de la majestueuse propriété des Douze chênes que le couple occupait.
« Scarlett releva le menton. Elle ramènerait Rhett à elle. Nul homme ne lui avait jamais résisté lorsqu’elle s’était mise en tête de faire sa conquête.Je penserai à cela demain, à Tara. Pour le moment, je n’ai pas le courage. Demain, je chercherai le moyen de ramener Rhett. »
Une fin ouverte, et qui le restera.
Mais ceci est une autre histoire…
Le premier opus du diptyque conçu par Pierre Alary s’organise précisément autour de Tara, point de départ et d’arrivée de l’intrigue. Il permet de faciliter une immersion dans cette œuvre-fleuve*, tout en induisant chez ses lectrices et lecteurs le désir d’en savoir plus sur le destin de ses protagonistes.
735 pages pour sa 1ère édition en 1938 chez Gallimard – 3h 58’ pour le film.
Avec cette adaptation BD « dépoussiérée » du roman paru aux USA en 1936, et la très belle mise en images de ses personnages cultes, dont Pierre Alary s’approprie aisément les figures principales, l’auteur signe une œuvre captivante qui passe outre la polémique qui s’est instaurée autour du roman de Margaret Mitchell, jugé raciste par une Amérique toujours marquée par une guerre, celle de Sécession, qui dans les années 1860 opposa le Nord abolitionniste et le Sud ségrégationniste, et sensible aujourd’hui au mouvement Black lives matter.
Sortes d’exutoires pour une population frappée par le destin, des jugements d’animaux étaient pratiqués au Moyen Âge qui poussaient à la barre, porcs, truie, vaches, lesquels finissaient le plus souvent au bûcher.
Les auteurs de la BD se saisissent du phénomène pour nous offrir une fable plus proche de nos préoccupations contemporaines qu’il n’y paraît. Ici, les protagonistes sont une brave truie, un sinistre juge et un avocat miséreux. Accusée d’avoir provoqué la mort d’un cavalier, une truie est conduite devant le tribunal : elle encourt la peine capitale. Le juge, un homme puissant qui n’a que mépris pour les êtres qu’il juge inférieurs, animaux, porchers ou même seulement femmes, fût-ce sa propre épouse, se trouve confronté contre toute attente à un avocat de talent qui défend avec ferveur la cause du malheureux animal…
Entretien avec Laurent Galandon et Damien Vidal.
Grégoire Seguin (délégué éditorial Delcourt) – Pourquoi nous raconter aujourd’hui le procès d’un animal au Moyen-Âge ?
Laurent Galandon – À cette époque les animaux peuvent être traduits devant un tribunal parce qu’ils sont considérés comme responsable de leurs actes, dans la mesure où, comme tous les êtres vivants, ils possèdent une âme. S’ils paraissent bien étranges aujourd’hui, ces procès étaient alors courants et conduisaient souvent à l’exécution de l’accusé. Appartenir à l’espèce animale n’était pas un critère pertinent pour décider de la manière dont on doit le traiter. Aussi ces procès étaient-il l’avant-garde de l’antispécisme, une notion somme toute très contemporaine ! Bien évidemment, derrière l’expression-même de la bonne justice, ils avaient alors surtout une valeur d’exemple pour les autres bêtes domestiques – croyait-on – mais surtout pour les hommes. En effet, ces tribunaux ne faisaient que renvoyer à une dichotomie universelle du fort contre le faible ; du dominant et du dominé. Aujourd’hui encore, le petit délinquant n’a pas les mêmes atouts que le voyou en col blanc pour se défendre. L’animal – domestique – reste un éternel dominé comme le sont le pauvre, le démuni ou les « minorités », sujets aux décisions arbitraires et à la maltraitance des hommes de pouvoir et de religion.
Damien Vidal – On imagine que les jugements d’animaux constituent une pratique tirée d’un Moyen Âge obscur et reculé. Pourtant, les exemples de condamnations d’animaux ne sont pas toujours aussi lointains. On connaît l’histoire de l’éléphant pendu, à Erwin, en 1916. Plus récemment (2008), le tribunal de Bitola (Macédoine) a condamné un ours pour avoir volé du miel dans les ruches d’un apiculteur. Ces exemples sont certes anecdotiques et il ne s’agit pas de considérer les procès d’animaux comme faisant partie de notre temps. Ce qui reste très actuel, c’est la maltraitance animale. Des abattoirs aux laboratoires, l’actualité ne manque pas de faits qui rappellent de quelles manières les animaux sont martyrisés. Le récit que nous proposons constitue un miroir certes déformant, mais nous pouvons malgré tout nous reconnaître. Au-delà des procès d’animaux, le vrai sujet de ce livre est celui de la bêtise humaine : c’est un sujet inépuisable et bien contemporain.
G.S. – Votre album offre une galerie de personnages plus truculents les uns que les autres. À qui va votre préférence ?
Laurent Galandon – Si l’Avocat semble être le personnage principal, le développement dialogué de l’album a porté ma préférence vers le Porcher (aucun des principaux protagonistes n’a de prénom au profit de sa fonction ou de sa nature). En effet le Porcher est profondément naïf (à ne pas confondre avec son apparente bêtise ; l’une de ses dernières répliques nous prouve le contraire). Cette naïveté le rapproche de son animal, la Truie. Comme elle, il est dépassé par une situation ubuesque. Son affection pour son ongulé force l’admiration et le respect tant elle est inconditionnelle et dénuée d’à priori. Finalement il est l’homme le plus animal de cette histoire. Et mon cœur va toujours vers les plus faibles.
Damien Vidal – En tant que dessinateur, je me suis surpris à aimer représenter les animaux. Ils font partie de ces personnages que j’ai eu le plaisir de retrouver sous mon pinceau (la corneille, le rat, la truie). Si la question concerne les humains, ma préférence va aussi au Porcher C’est également une affaire de dessin. Dans ce livre, je me suis amusé à varier les registres graphiques : plutôt réalistes pour certains personnages, franchement « gros nez » pour d’autres. Le Porcher fait partie de ceux-là et je trouvais assez drôle de le dessiner. C’est aussi le candide de l’histoire. Il ne comprend pas toujours le monde imbécile dans lequel il vit. En ce sens, il est plutôt attachant.
G.S. – Quel message souhaitez-vous communiquer au lecteur à travers ce récit ?
Laurent Galandon – La Truie, le Juge et L’avocat est construit autour d’un procès atypique. Or, durant une telle instance, il est nécessairement question de justice et son pendant d’injustice (ou inversement). Ce sont-là finalement les deux faces de toute histoire, voire de toutes mes histoires : un personnage confronté à une situation qui le contraint à agir pour se dédouaner de l’une ou pour obtenir l’autre. Donc ici, dans ce conte sombre et drôle, je continue à suivre un même fil : dans tout combat, même quand on le perd, il y a une petite victoire cachée ou un retournement possible.
Damien Vidal – Il y a une morale de l’histoire et c’est la corneille qui l’énonce à la fin du récit. Je ne dis rien de plus pour ne pas spoiler.
L’histoire de la Jamaïque et du reggae racontée à travers le mythique One Love Peace concert, donné par Bob Marley à Kingston le 22 avril 1978. Il symbolise son retour après deux ans d’exil, grâce à deux chefs de gangs décidés à mettre fin à la guerre civile qui déchire la Jamaïque. Près de 50 ans plus tard, Loulou Dedola est allé à la rencontre des derniers témoins pour raconter les coulisses du concert de Bob Marley en Jamaïque. C’est toute l’histoire de la Jamaïque et du reggae qui prend vie sous la plume de Luca Ferrara. Que s’est-il passé réellement avant pendant et après le concert reggae donné au stade de Kingston ? Deux partis politiques se livrent une lutte sans merci pour le pouvoir. L’électorat du ghetto est crucial pour départager le très conservateur JLP (Jamaica Labour Party) du socialiste et non-aligné PNP (People’s national Party). Les deux partis ont recours aux gangs pour prendre le contrôle électoral des « slums » (taudis) et des « shanty towns » (bidonville) de Trenchtown, Tivoli Garden, Kingstown Twelve… La guerre civile fait rage. On assassine, on pille, on viole sous toutes les bannières. Pourtant, de deux camps opposés, deux hommes vont tenter d’inverser le cours des événements : Claudius Massop et Bucky Marshall. Ils appartiennent à des gangs rivaux mais leurs routes vont se croiser au fond d’une cellule de la prison de Kingston. Ces hommes forts des gangs de Tivoli Garden et Trenchtown savent que le reggae est le ciment du peuple jamaïcain. L’idée d’un concert pour la paix germe dans leurs esprits. Pour cela ils ont besoin d’un homme, le roi du reggae, leur ami d’enfance, parti en exil deux ans auparavant après un attentat manqué contre lui : Bob Marley !