Adaptation et illustrations Alexis Nesme – Ed. Delcourt, 2016.
26 juillet 1864, un requin-marteau vient d’être harponné et hissé à bord du yacht de lord Glenarvan, le Duncan. Comme il se doit, les entrailles du squale sont soigneusement examinées. On y découvre une bouteille contenant trois feuillets en piteux état. Une date, une carte géographique incomplète et quelques bribes de mots permettent cependant de reconstituer le puzzle : le Britannia s’est abîmé dans une région située le long du 37e parallèle, avec à son bord le fameux explorateur écossais, Harry Grant, dont on est sans nouvelles depuis au moins deux ans. Une expédition est montée par le très fortuné lord, que l’Amirauté écossaise a lâché faute de certitudes. Mary et Robert Grant, déjà orphelins de mère, seront du voyage.
Commence alors un périple de cinq mois à la recherche des disparus, au cours duquel les protagonistes vont devoir affronter la dureté des éléments en Patagonie, la cruauté des hommes en Australie, le cannibalisme des Maoris en Nouvelle-Guinée… Avec en filigrane, une réflexion sur l’oppression des autochtones par les colons européens.
La trame de ce récit en trois parties reste classique et semble avant tout destinée aux adolescents. Cependant le roman de Jules Verne comporte différents niveaux de lecture. Il illustre notamment le passage de l’enfance à l’âge adulte, la symbolique de la recherche du père et la nécessaire distinction entre l’expérience et le raisonnement.
Les personnages sont ici représentés sous la forme d’animaux : lord, lady Glenarvan et les jeunes Grant sont d’élégants félins ; le capitaine Mangeles, toujours un peu bougon, est un ours ; l’extravagant géographe, le Français Paganel, véritable puits de science, est une grenouille (un clin d’oeil aux « French frog eaters » ?) ; le traître Ayreton, que l’on retrouvera plus tard dans L’Île mystérieuse, a tout du renard.
Le dosage entre la densité du récit (beaucoup de bulles, un grand nombre de cartouches) et les illustrations virtuoses d’Alexis Nesme (gouache, encres, pastels gras, clairs-obscurs) compose un ensemble très réussi.
Les inconditionnels du roman Jules Verne y retrouveront aisément leurs petits, ceux qui le découvriront au-travers de cette adaptation new look seront très probablement sous le charme.
Anne Calmat
152 p., 22,95 €