Motor girl

21 août, BdBD/Arts pluriels reprend ses chroniques bihebdomadaires…
En librairie le 22 août 2018

de Terry Moore (scénario et dessin) – Ed. Delcourt. Visuels © Delcourt/T. Moore

Libby

Samantha, ex Marine, est atteinte d‘un syndrome post-traumatique, avec en prime un éclat d’obus fiché dans la boîte crânienne, ce qui lui vaut de terribles migraines. Elle vit retirée du monde dans le désert du Nevada et gère un garage – ou plutôt une casse de voitures – qui appartient à la vieille Libby. Sam a pour seul compagnon Mike, un gorille qui lui sert à la fois de béquille et de nounou. Elle semble être la seule à le voir…

Un soir une soucoupe volante vient se crasher à proximité de la casse. Sam répare la soucoupe. Pour la remercier de son excellent travail, Bik l’extra-terrestre fait passer le mot à travers toute la galaxie et le garage devient rapidement le lieu de rendez-vous d‘engins venus d’ailleurs. Parallèlement, l’immense terrain qui abrite la casse est convoité par un certain Walden, qui offre un pont d’or à Libby pour qu’elle le lui vende. Pas question, cette casse est à ses yeux le meilleur endroit pour que Sam prenne le temps de se reconstruire, avant de retrouver sa famille. Et peut-être, mais ça Libby ne le sait pas, pour l’aider à atténuer sa douleur d’avoir vu un jeune irakien mourrir sous les bombes, alors qu’ii venait de lui confier son petit singe en peluche.

Au début, l’histoire  peut sembler un peu loufoque : cette jeune femme qui vit avec un gorille imaginaire, l’irruption de deux adorables extra-terrestres, suivie de celle dindividus qui n’hésitent pas à exercer sur elle un odieux chantage pour arriver à leurs fins, et pour finir, la résistance d’une mamie au grand cœur…

Mais on se dit rapidement que derrière la fable, c’est en grande partie l’Amérique de J.F.K., de G.W. Bush jr et de leurs successeurs qui est pointée du doigt. L’Amérique de ceux qu’on a appelés « les Revenants », avec leur difficile et parfois impossible reconstruction, lorsque les réminiscences du passé et le présent ne font plus qu’un, et que ce qu’ils avont vécu demeure insoutenable, qu’ils aient ou non eu à faire face à des séquelles physiques.

Nous n’en dirons pas plus, si ce n’est que les planches, particulièrement soignées et souvent métaphoriques de Terry Moore, démontrent une nouvelle fois la monstruosité des guerres, avec leurs mensonges, leurs calculs, leurs oublis… et leurs oubliés.

Anne Calmat

224 p., 19,99 €