de Bill Griffith (scénario et dessin) – Ed. Delcourt, Collection Outsider –
Le récit de Bill Griffith, petit-fils du photographe William Henry Jackson, a pour origine les minutes qui ont suivi le décès de son père, en 1972. Sa soeur et lui apprennent alors de la bouche de leur mère, Barbara, qu’elle a entretenu durant seize ans une liaison avec le dessinateur de presse-auteur de polars, Lawrence Lariar. « Si je ne vous le dis pas maintenant, je ne serai jamais capable de vous le dire… »
La teneur du journal intime de Barbara, découvert lors sa disparition en 1998, est une autre source d’étonnement pour Bill, qui envisage son histoire familiale sous un angle différent.
En 1956, les disputes sont fréquentes au sein du couple Griffith, aussi Barbara décide-t-elle d’aller à New York pour y travailler. Une annonce lui en fournit l’occasion. « Envoyez votre candidature à Lawrence Lariar… » Un écrivain ! Merveilleux ! La jeune femme rêve de devenir romancière. Elle sera dans un premier temps l’assistante du grand homme, et bien plus, puisque affinités il y avait.
S’en suit alors de la part de l’auteur, devenu cartoonist mais resté « underground », une enquête approfondie sur Lariar, qu’il appelle « son père de l’ombre« . Il se demande quelle tournure aurait pris sa carrière s’il était devenu son mentor.
Griffith croyait tout savoir sur sa mère, il découvre une femme aux multiples visages, totalement désinhibée, et surtout, immensément amoureuse de celui qui va la révéler à elle-même et l’ouvrir à la vie artistique et intellectuelle new-yorkaise. « À peu près tout ce que j’ai fait de bien pour mes enfants vient de cet homme que j’aime tendrement, entièrement et définitivement. Et à peu près tout ce que j’ai fait de bien pour moi-même vient de la même source ». Un long extrait du journal de Barbara donne à voir les différents aspects de l’american way of life dans les années de l’après-guerre, avant de se refermer sur une chute relativement prévisible. Les dessins de Bill Griffith ont eux-mêmes une similitude avec ceux des comic strips des années 50.
C’est également sous un jour totalement inattendu que Bill va découvrir ce père au caractère peu amène, qui avait laissé chez ses enfants un souvenir pour le moins mitigé.
Anne Calmat
208 p., 15,50 €
Visuels © Delcourt