Coup d’œil dans le rétro…

d’après le roman de Dennis Lehane, scénario et dessin Christian De Metter. – Ed. Rivages/Casterman/Noir
Visuels © Casterman / De Metter
Les marshals fédéraux, Teddy Daniels et Chuck Aule, ont été chargés d’enquêter sur la disparition d’une femme dans l’hôpital psychiatrique de Shutter Island, où sont internés des délinquants particulièrement dangereux.
Dès l’abord, les investigations s’avèrent difficiles : l’île est petite et très surveillée. Comment Rachel Solando, accusée d’un triple infanticide, a-t-elle pu, sans être vue, sortir de sa chambre, passer devant plusieurs postes de garde, traverser la pièce où se déroulait une partie de cartes ?
Le Dr Cawley, qui va suivre de près le travail des enquêteurs, les informe qu’ils ne pourront avoir accès aux dossiers des détenus. En revanche, le psychiatre leur remet un feuillet trouvé dans la chambre de Rachel, et qui contient une suite de chiffres et de lettres.
Daniels, le chef du binôme, commence à les déchiffrer.
De son côté, son acolyte a pu constater, à la faveur d’une absence de Cawley, qu’à compter de la veille de leur arrivée, quatre pages de son agenda portent la seule indication » Patient 67 « . En interprétant les cryptogrammes, Daniels aboutit au chiffre 67. Ayant appris que l’établissement ne compte officiellement que soixante-six détenus, il se demande s’il n’en existerait pas un soixante-septième…
Le psychiatre et ses collègues sont d’habiles manipulateurs. Après être passé par leurs mains, on ne sait plus très bien qui est sain d’esprit – ou même si quelqu’un l’est encore…
On se perd dans les méandres de ce thriller particulièrement bien ficelé, jusqu’à la révélation finale… qui provoque chez le lecteur l’envie de relire l’album dans la foulée.
Un dégradé de couleurs éteintes, soumises à un éclairage minimaliste, renforce l’atmosphère oppressante qui plane sur Shutter Island. Les dessins sont remarquables et participent eux-aussi à la réussite de cet album à (re)découvrir.
Jeanne Marcuse
128 p., 19€

Après Shutter Island, Christian De Metter s’attaque avec tout autant de brio à un monument du polar noir américain, inspiré de la vie d’Al Capone : Scarface de Armitage Trail (1902-1930).
Mourrir ce n’est pas si terrible finalement. Tout s’éteint d’un coup et basta. Ce qui est terrible, c’est de savoir qu’on va mourir. Cela peut ne durer qu’une fraction de seconde… Mais cette fraction de seconde peut être un enfer.
Fils d’émigrés italiens, Tony Guarino a grandi avec son frère à Chicago. Au fil des années, leurs visions respectives de l’existence les a séparés, Ben est entré dans la police, alors que Tony s’est acoquiné avec les voyous de la ville.
Au moment où débute le récit, après un « prologue-épilogue » qui tient sur une seule planche (ci-dessus), Tony s’est mis à fréquenter Vyvyanne, la femme d’Al Spingola, le caïd de la ville.
Surpris avec elle dans un bar par Spingola, Tony prend les devants et abat le gangster. Il se rapproche ensuite de l’Irlandais O’hara pour s’immiscer dans le Milieu, et lui soumet des idées de business lucratif et sans risque, comme par exemple protéger les habitants d’éventuels agresseurs, en échange d’une petite participation. On fera ce que les flics ne sont pas fichus de faire…

Guarino grimpe rapidement les échelons dans l’organisation du nouveau parrain, fréquemment en proie aux attaques des anciens acolytes de Spingola. Afin de calmer le jeu, il s’engage dans l’armée et part faire la guerre en Europe. Après avoir perfectionné sous toutes ses formes l’art de tuer en toute légalité et avoir été blessé, il en revient avec un visage balafré sur le côté gauche, et sous l’identité de Tony Camonte. On le surnommera désormais Scarface.
À Chicago, on m’aurait envoyé en taule pour avoir dézingué tant de types, là on m’file des médailles.
Mais O’hara est mort, et sa place à lui ne lui est plus acquise… Scarface doit faire ses preuves.
Guerres de gangs, bains de sang, histoires de femmes, trahisons, magouilles avec les notables et les haut-gradés de la police se succèdent et constituent la trame de ce récit tout en noirceur, avec en son centre, un homme dominé par l’ambition et la soif de pouvoir.
La narration très fluide et les dessins réalistes aux couleurs souvent crépusculaires de Christian De Metter font de cette adaptation, fidèle au roman initial, un vrai plaisir de lecture.
108 p., 18€
Anna K.